Entretien avec une hôtesse de jet privé (Ouarda M.)
- Depuis combien de temps êtes-vous hôtesse de l’air ?
J’ai commencé ma carrière en 1996 exactement, donc ça fait à peu près 22 ans.
- En quoi consiste votre métier ?
Tout simplement d’accueillir nos passagers à bord de l’avion et de s’assurer de leur sécurité et du bon déroulement du vol ; nous veillons à leur confort et à leur sécurité.
- Avez-vous toujours eu envie d’exercer ce métier ou, dans le cas contraire, comment en êtes-vous arrivée à devenir hôtesse de l’air ?
Oui, écoutez depuis mon plus jeune âge je voulais être hôtesse de l’air. Vraiment depuis toujours. À l’école quand on nous donnait une petite fiche nous demandant ce qu’on voulait faire quand on serait grand, je répondais tout le temps hôtesse de l’air ; quand j’étais toute petite je pointais les avions du doigt à mes parents en leur disant que j’adorais l’avion. Et quand je prenais l’avion, je regardais tout ce qu’il se passait autour de moi et je ne dormais pas parce que j’étais fascinée. Je ne saurais pas l’expliquer mais j’ai toujours su que je voulais faire ce métier et travailler dans un avion.
- Quelle a été votre formation ?
À la fin de mon cursus scolaire, mes parents m’ont inscrite à une école de tourisme à Paris. Je suis ensuite allée à Londres pendant deux ans pour perfectionner mon anglais. C’était pour avoir le maximum de chances d’être recrutée ; je visais Air France à l’époque. Mais les recrutements ont été gelés à Air France pendant cinq ans et finalement j’ai été recrutée par une compagnie commerciale étrangère et ai fait une formation intensive pour les avions commerciaux. J’ai été basée à Paris pendant six mois avant d’intégrer la section VIP. NetJets m’a ensuite recrutée et fait passer une formation approfondie et complète, qui a réellement fait décoller ma carrière. J’ai une grande expérience internationale de vols VVIPS sur différents types de jets privés. Je travaille aujourd’hui en freelance et je devais signer un contrat avec un VIP basé en Afrique mais malheureusement c’était pendant le début du covid, donc cela n’a pas pu se faire. En ce moment je suis à la recherche d’un emploi et une ouverture se profile peut-être ; j’espère que cela pourra se faire car toutes mes expériences ont renforcé ma capacité d’adaptation.
- Peut-on directement être hôtesse de l’air pour le privé ou doit-on commencer par travailler pour les lignes commerciales ?
Dans l’aviation privée, il vous demande un minimum de trois années d’expérience en classe affaires. Après c’est vraiment au fil du temps que l’on apprend notre métier quand on travaille dans le privé. C’est vraiment un apprentissage continu mais c’est un atout.
- Suivez-vous toujours des formations ?
J’ai envie de vous dire oui. Il y a des refreshment training où on est tout le temps dans le « upgrade », dans l’amélioration du service. On doit aussi être à jour dans les équipements de sécurité.
Aviation d’affaires
- Quelles sont les évolutions au sein du métier ?
Il y a des évolutions qui se font en fonction des années d’expérience. Dans les jets privés on est deux en général, et on peut accéder à la position de lead flight attendant, puis ensuite chef hôtesse. Beaucoup de mes collègues sont aussi devenues instructeurs par la suite.
- Quelles différences majeures avez-vous constatées entre l’aviation commerciale et l’aviation privée ?
Travailler en tant que VIP flight attendant est beaucoup plus fun pour être honnête car vous avez une gestion logistique très importante de l’avion. Un autre point très important est que le contact entre une VIP flight attendant et ses passagers est plus personnel car au fil du temps, elle apprend à les connaître, ce qui permet de leur assurer un service au-delà de leurs attentes car pour ma part, avoir le sens du détail est la clé pour garantir un service d’excellence. J’aime vraiment beaucoup l’aviation privée, c’est un autre monde. Mais il faut être très organisé et on n’a pas le droit à l’erreur Mes fonctions sont aussi très changeantes par rapport à celles d’une hôtesse commerciale et il est très rare de savoir à l’avance nos destinations.
- Qu’est-ce que vous aimez le plus et le moins dans votre métier ?
J’aime le challenge et pour moi tous mes vols sont un challenge. J’aime aussi tous les aspects de mon métier, c’est vraiment un métier atypique et je fais toujours en sorte que mes vols soient une réussite. Je vous promets je suis extrême sincère quand je vous dis que j’aime tout dans mon métier. Parfois les horaires sont durs mais quand on aime son métier on accepte la flexibilité et on s’habitue.
- Pouvez-vous nous raconter une journée type ?
Il n’y en a pas dans l’aviation privée. Je peux vous dire comment cela se passe rapidement. La veille de mes vols je prépare mes commandes de catering selon le profil de mes passagers, je m’assure que le « linge de bord » (linen en anglais) soit propre (je suis un peu minutieuse). Avoir le sens du détail est extrêmement important, c’est ce qui fait la différence entre un bon service et un service excellent. S’il le faut, on se rend à un supermarché pour aller chercher les derniers éléments manquants, du gel antibactérien ou un citron par exemple.
- Quelles sont les compétences requises pour être une bonne hôtesse de l’air (VIP) selon vous ?
J’en ai beaucoup à vous dire. Alors selon moi, si elle veut exceller dans l’aviation d’affaires, une hôtesse doit être altruiste et discrète avant tout, et qu’elle aime les gens de manière générale. Je dirai aussi qu’être à l’écoute et savoir cuisiner sont des atouts importants. La restauration que nous proposons à bord est la plupart du temps des repas gastronomiques, et d’après mon vécu, il faut savoir ce que l’on sert et le vocabulaire gastronomique est un plus. Je dirai également savoir anticiper, être très autonome et avoir le sens du détail. Et enfin, si cela peut aider d’autres hôtesses j’ai encore quelques éléments : être ponctuelle, dynamique, alerte, toujours positive et accueillante avec une présentation impeccable, et avoir une connaissance des produits fins (vins, gastronomie, cosmétique, décoration haute gamme). En résumé, trouver une bonne harmonie entre action et discrétion, et pouvoir être « multifonctions », nous devons être perspicaces afin de répondre aux éventuelles demandes particulières des passagers.
Questions personnelles
- Trouvez-vous difficile de concilier vie professionnelle et vie personnelle ?
Franchement pas du tout. C’est vraiment mon point de vue personnel mais je pense que cela permet de ranimer ma relation avec mon partenaire. C’est vrai que ce n’est pas très commun mais on est toujours contents de se retrouver et à chaque retour de vol nous avons toujours beaucoup de choses à nous raconter.
- Quel vol vous a le plus marqué ?
C’est celui avec un roi. Pour des raisons de confidentialité je ne peux pas en dire plus mais j’ai été marquée par son humilité, son côté humain et très abordable.
- Quels sont les changements que vous aimeriez voir dans l’aviation privée ?
J’aimerais voir des changements, surtout depuis 4-5 ans. Les employeurs devraient accorder plus d’importance à notre travail car cela contribue vraiment à la réussite d’un vol. Les prestations que l’hôtesse propose pendant mais aussi en amont et après le vol sont très importantes. Les hôtesses aident à fidéliser les clients en représentant la compagnie, surtout car le bouche-à-oreille est très important dans ce secteur.
- Un message à faire passer ou un conseil à donner à de futures hôtesses ?
Très simplement, le seul conseil que je peux donner est d’être passionné, de se surpasser afin de perdurer dans ce métier très atypique mais tellement magique.